Malgré leur impact considérable, les maladies neurologiques ont souvent été négligées dans le programme de santé mondial. Cependant, les choses sont en train de changer et nous constatons que le diagnostic et la prise en charge des maladies neurologiques font l'objet d'une attention accrue. En 2018, la Déclaration politique de haut niveau des Nations Unies sur les MNT a ajouté les troubles neurologiques et mentaux en tant que cinquième priorité du programme mondial de lutte contre ces maladies. En 2020, l'OMS a créé une unité « Santé du cerveau » qui a mis au point une réponse intégrée à la neurologie avec le Plan d'action mondial intersectoriel sur l'épilepsie et les autres troubles neurologiques 2022-2031, adopté par tous les États membres de l'OMS en 2022. La Fédération européenne des associations neurologiques (EFNA) fait partie des organisations qui plaident en faveur d'une meilleure qualité de vie des personnes vivant avec des troubles neurologiques, et se concentre sur l'Europe.

La prévention, le diagnostic précoce et l'intervention ont une importance considérable pour les personnes vivant avec des maladies neurologiques, car le cerveau est un organe dont la capacité de régénération est très limitée. En outre, dans de nombreuses affections neurologiques, les stades silencieux de la maladie peuvent souvent durer des années, voire des décennies, avant que des symptômes ne commencent à apparaître. Le dépistage précoce peut donc améliorer la qualité de vie des personnes touchées, réduire les coûts des soins de santé et prévenir des lésions cérébrales irréversibles. Il n'est cependant pas toujours facile d'accéder au diagnostic et à la prise en charge des maladies neurologiques, même en Europe où se trouvent certains des meilleurs systèmes de santé au monde.

Des besoins non satisfaits

En 2022, l'EFNA a mené une enquête pour évaluer les parcours de diagnostic et de prise en charge des personnes vivant avec des maladies neurologiques en Europe. L'enquête a montré qu'en dépit de la disponibilité de diagnostics et de traitements efficaces, tout le monde en Europe n'y a pas accès de la même manière, ce qui entraîne un écart dans la prise en charge et de graves interruptions dans le continuum des soins. En effet, les résultats montrent que seule une personne sur cinq vivant avec une maladie neurologique a accès à des interventions thérapeutiques abordables qui permettent de gérer la maladie de manière satisfaisante. Par ailleurs, malgré une prévalence plus élevée chez les femmes que chez les hommes de nombreux troubles neurologiques (sclérose en plaques, migraine, maladie d'Alzheimer), les stéréotypes liés au genre peuvent avoir un impact négatif et entraîner un sous-diagnostic, un diagnostic erroné et un retard de traitement.

L'enquête a révélé que la quasi-totalité des personnes concernées se heurtent à des problèmes tels que le manque de sensibilisation des professionnels de la santé : 84 % des patients ont indiqué que leur médecin traitant avait des connaissances insuffisantes sur leur maladie, ce pourcentage étant de 56 % pour les spécialistes. Ces résultats soulignent la nécessité d'améliorer les niveaux d'éducation et de formation des professionnels de la santé.

La grande majorité des personnes vivant avec des maladies neurologiques (92 %) estiment que leurs besoins psychologiques ne sont pas non plus satisfaits. Pour les aider à gérer les problèmes de santé mentale associés à leur maladie, elles souhaitent pouvoir bénéficier de soutien psychologique ou de thérapie.

Les résultats de l'enquête soulignent également l'importance d'impliquer les personnes vivant avec des MNT dans les décisions qui affectent leur santé. En impliquant les patients dans la prise de décision, on s’assure que leurs préférences, leurs valeurs et leurs besoins sont pris en compte dans le processus décisionnel en matière de soins de santé, ce qui débouche sur de meilleurs résultats de santé, une plus grande satisfaction des patients, une amélioration de l'efficacité des soins de santé et une réduction des coûts. Consciente de ces avantages, l'EFNA s'efforce de responsabiliser les personnes vivant avec des maladies neurologiques et de les faire participer au processus décisionnel afin d'améliorer la qualité des soins et de réduire les écarts dans la prise en charge.

Pour ce faire, nous renforçons les capacités de nos membres, ce qui leur permet d’être les défenseurs les plus efficaces possibles dans leurs domaines spécifiques.

Au cours des 20 années d’activité de l'EFNA, nous avons appris qu’en motivant, en inspirant et en responsabilisant les personnes vivant avec des maladies neurologiques, on obtient une participation et une implication plus significatives des défenseurs des patients dans la politique et les processus décisionnels, ainsi que dans la recherche et le développement. Notre travail sur l'évaluation des parcours de diagnostic et de prise en charge des personnes vivant avec des maladies neurologiques indique un besoin urgent de combler les écarts existant dans la prise en charge et d'améliorer le continuum des soins, pour les maladies neurologiques et l’ensemble des MNT.

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Tadeusz Hawrot portrait

Tadeusz Hawrot

Tadeusz Hawrot est consultant en santé publique et conseiller expert en politiques pour la Fédération européenne des associations neurologiques. Il a travaillé pendant 15 ans dans la sphère de l'UE, dirigeant les activités de politiques et plaidoyer de plusieurs organisations de la société civile dans le domaine de la santé du cerveau. Il a joué un rôle déterminant dans la mise en place de nouvelles alliances de plaidoyer telles que les Conseils nationaux du cerveau, la plateforme portugaise sur l'impact sociétal de la douleur, l'alliance européenne pour l'accès et la recherche sur les psychédéliques (PAREA), et OneNeurology, un partenariat mondial. Il collabore avec l'OMS et d'autres défenseurs de la santé mondiale.